Atelier scénario (Scenario workshop)

Les ateliers scénario sont des réunions locales d’individus. Ils s’inscrivent dans le cadre de la réflexion sur le développement durable et visent à inciter les participants à trouver des solutions orientées vers l’action. Les ateliers regroupent des personnes issues de milieux divers. Chaque groupe d’acteurs discute à propos de scénarios qui présentent des manières de résoudre un problème local envisagé. Chaque scénario a ses avantages, ses inconvénients, ses limites techniques et organisationnelles et sous-tend des valeurs politiques, culturelles et sociales. Il sert à guider la discussion et à inspirer les participants. À la fin, les groupes confrontent leurs conclusions en vue d’établir un plan d’action.

Quand utiliser cette méthode?

• Lorsque l’on souhaite développer une vision prospective sur l’avenir d’une ville ou d’une région et sous l’angle d’un problème spécifique (énergie, traitement des déchets, technologies de l’information, etc.).
• Lorsqu’il y a d’importantes divergences locales.
• Lorsque l’on veut évaluer différents choix de développement.
• Lorsque l’on veut choisir entre différents types de technologies.

Qui participe?

Les ateliers scénario réunissent quatre groupes de personnes: des habitants de la population locale, des élus locaux, des acteurs socio-économiques et des experts (archéologues, architectes, urbanistes, etc.). En tout, une trentaine de personnes peuvent s’impliquer dans le processus (de quatre à huit personnes par groupe). L’atelier scénario fait participer, sur une base volontaire, des acteurs initialement concernés.

Temps requis

La méthode s’étale généralement sur une ou deux journées de débats.

Les étapes

Étapes préparatoires
• Élaboration des scénarios soumis aux ateliers avec des experts externes et les responsables du projet. Ces scénarios proposent une organisation et des solutions technologiques différentes pour résoudre un même problème.
• Recrutement des acteurs volontaires provenant des groupes identifiés.

Étapes de la méthode
• Présentation des scénarios aux participants et critiques et commentaires au sein de chaque groupe d’acteurs.
• Discussions en groupe thématique. D’abord, les participants critiquent et révisent les quatre scénarios proposés. À partir des commentaires, les participants élaborent des visions de développement. Ensuite, ils établissent les diverses contraintes et barrières (d’ordre social, politique, économique, etc.). À noter: les participants prennent la parole en se basant non seulement sur leurs savoirs techniques, mais également sur leurs valeurs et convictions.
• Présentation des idées et des manières de les appliquer en plénière.
• Débat collectif et élaboration d’un plan d’action.

Suivi
• Présentation des résultats de l’atelier à la presse.

Forces

• Pousse à identifier à examiner les divergences ou convergences entre les différents groupes.
• Permet d’élaborer différentes stratégies éventuelles, de réunir des participants d’horizons différents et d’aller au-delà des stéréotypes.
• Favorise l’échange de connaissances, d’opinions, d’idées.
• Encourage une certaine créativité de la part des participants.
• Facilite une coopération allant dans le sens de la stratégie retenue.

Faiblesses

• La méthode nécessite beaucoup de ressources en termes de temps et de budget.
• Les résultats sont imprévisibles.
• Il est difficile de mobiliser les décideurs politiques et les volontaires, dans la mesure où la méthode prétend être à la fois un outil de délibération et un outil de résolution de conflit.
• La méthode est difficile à médiatiser en raison de son caractère local.
• Elle implique une incertitude quant aux développements futurs et une difficulté à estimer la probabilité de certains événements.

Variantes

• On peut procéder à la construction des scénarios en groupes et faire une mise en commun par la suite.
• Les scénarios peuvent être fournis à l’avance et simplement rappelés aux participants en début de processus.
• L’atelier scénario est souvent utilisé pour améliorer d’autres méthodes délibératives.

Degré de participation des citoyens

Niveau 3 – délibérer et proposer.

Expérience 1

Atelier local EASWAtelier local EASW (European Awareness Scenario Workshop)

Lieu: la ville de Pamiers (France)

Date: 1998

Promoteur/organisateur
ADAGE Environnement, groupe de conseils et d’études en environnement et développement durable, et l’Agence régionale pour l’environnement (ARPE).

Objectifs de la méthode employée
L’exercice avait pour but de générer un dialogue, une collaboration afin de construire une démarche régionale pour les villes durables tout en proposant des orientations pour l’ARPE. L’exercice visait la formulation de nouvelles idées et de recommandations en vue d’actions locales, présentées aux autorités locales et au public en conférence de presse. Pour l’ARPE, l’activité a permis de former les responsables à la méthodologie, qui a servi d’outil de réflexion et de propositions.

Finalité recherchée
L’objectif de l’atelier consiste à identifier et clarifier les différentes combinaisons de la technologie, de la politique publique ainsi que des actions privées et sociétales en vue de créer un environnement urbain durable pour la région dans les décennies à venir. Les participants ont imaginé les villes de la région Midi-Pyrénées avec un environnement urbain durable à l’horizon 2010 et formulé de nouvelles idées et recommandations en vue d’actions locales, en particulier au niveau régional avec l’ARPE.

Acteurs mobilisés
Un groupe de 30 personnes représentant des collectivités locales: experts en technologie, habitants, jeunes et représentants d’entreprises du privé.

Conditions ou contraintes de réalisation
L’événement a eu lieu pendant deux soirées. Il y a eu une certaine difficulté à mobiliser des experts locaux en lien avec les thèmes abordés.

Enjeux
La région Midi-Pyrénées a souhaité former et sensibiliser les villes de la région au développement durable, favoriser les expériences innovantes dans ce domaine et les diffuser auprès des acteurs concernés. L’environnement urbain étant affecté par le comportement de tous les citadins, les participants à la méthode ont discuté et travaillé sur les problèmes et les solutions dans les domaines de l’énergie, de l’approvisionnement en eau et eaux usées, de la gestion et du recyclage des déchets solides, ainsi que de la vie quotidienne et du logement.

Processus de participation
• Présentation du programme, du contexte, des objectifs et des règles de l’atelier.
• Discussion en groupes. Question: «Comment imaginez-vous un environnement durable dans les villes de Midi-Pyrénées à l’horizon 2010?» Élaboration d’un slogan, d’un diagnostic de la situation, d’une évaluation des freins et des leviers.
• Présentation par les groupes et discussion générale suivie de questions et critiques.
• Séance en groupes thématiques. Question: «Comment relever les défis d’un environnement durable dans les villes de Midi-Pyrénées?» Après une discussion sur les propositions faites par les groupes d’acteurs, des actions prioritaires sont retenues et présentées ensuite à l’ensemble des participants.
• Vote pour choisir les cinq meilleures idées.

Résultats
L’atelier a produit un ensemble de propositions discutées et validées en séance plénière. Les groupes thématiques ont présenté le résultat de leurs discussions aux autres participants.

On a ainsi établi cinq priorités principales après un vote en plénière et selon un système de points:
1. Gestion globale de l’eau.
2. Valorisation de l’eau dans la ville.
3. Diagnostic énergétique des bâtiments communaux.
4. Parlement local en environnement.
5. Créer les conditions du tri sélectif.

Évaluation

L’expérience a bien fonctionné mais s’est avérée un peu courte (deux soirs seulement). Les résultats sont assez probants chez le groupe des jeunes, qui ont eu des propos pertinents. On estime donc qu’il s’agit d’un ajout à préconiser. En début de processus, on a procédé au visionnement d’un documentaire, mais il a eu un impact à peu près nul (voire négatif) sur la qualité des échanges.

La méthode permet la participation de tous. En revanche, la première étape de l’atelier a été plus compliquée. On suggère de commencer avec trois scénarios (un scénario de base, un scénario positif et un scénario négatif), pour éviter les redondances et les longueurs. Pour ce qui est du vote final sur les cinq priorités, beaucoup de propositions ont dû être évacuées, ce que les gens de ARPE ont jugé désolant.

Expérience 2

EASW en Pamplona

Lieu: Sede del Inap, Pamplona (Espagne)

Date: 1997

Promoteur/organisateur
Le Département de la femme de la mairie de Pamplona, en collaboration avec le ministère de la Planification, avec comme organisateur le Colectivo de Mujeres Urbanistas, une organisation de professionnelles des milieux de la géographie, de l’urbanisme et de l’architecture dont l’objectif est d’introduire l’analyse spatiale en termes de genre.

Objectifs de la méthode employée
• Informer le public sur le projet du Plan urbain général.
• Créer un espace de dialogue où les femmes de Pamplona puissent discuter de la situation actuelle de la ville et faire des propositions pour l’améliorer.
• Introduire le thème de l’espace urbain et promouvoir la participation des groupes dans les affaires urbaines.

Finalité recherchée
• Produire un document contenant certaines propositions des femmes, qui pourra être utilisé pour le plan de développement général de la ville.
• Encourager la participation active des femmes dans la planification urbaine afin de créer un espace tenant compte de la diversité et des moyens de chaque personne.

Acteurs mobilisés
Collectifs et associations de femmes: 90 femmes réparties en groupes de 15 à 20 personnes par atelier.

Enjeux
• Démystifier des questions urbaines et éveiller l’intérêt de nombreuses femmes pour les espaces urbains.
• Sensibiliser les femmes à une attitude active et à une plus grande participation dans les affaires relatives à leur ville – leur espace vital.

Processus de participation
• Présentation de quatre documents introduisant le thème «espace et genre».
• Présentation des thèmes retenus pour les ateliers: le logement, la rue, le commerce, les infrastructures.
• Constitution des groupes.
• Exposé sur chacun des thèmes pendant une demi-heure par l’organisation.
• Présentation d’un scénario et de quelques questions initiales pour susciter le débat.
• Rotation des groupes pour que toutes les femmes participent aux quatre ateliers.

Résultats
• Formulation de propositions concrètes à intégrer dans le plan général se rapportant aux quartiers, à la ville, à la conception des maisons, aux rues, au transport interurbain, au commerce, aux infrastructures.
• Ramassage de nouvelles idées autour de la qualité de la vie urbaine, de la promotion du petit commerce, etc.

Évaluation
Le Colectivo n’a pas fait d’évaluation, mais il est satisfait des résultats obtenus à la suite des échanges.

Différences notables entre les deux expériences

• Les acteurs mobilisés ne sont pas les mêmes.
• Expérience 1: autorités, habitants de la ville, jeunes et autres. Un total de 30 participants réunis en deux soirées.
• Expérience 2: seulement des femmes. Un total de 90 personnes réunies en une journée.
• Les objectifs n’étaient pas tout à fait les mêmes.

Léonore Pion et Florence Piron, «Les méthodes prospectives», dans Léonore Pion et Florence Piron (dir.), Aux sciences, citoyens!, Montréal, Les Presses de l’Université de Montréal, 2009.
Centre de recherche Spiral, Département de science politique, Université de Liège, L’atelier-scénario, 2011. En ligne.
Fondation Sciences citoyennes, Les ateliers scénario, 2004. En ligne.
Danish Board of Technology, The Scenario Workshop, 2008. En ligne.
The European Awareness Scenario Workshops (EASW). En ligne.
Colectivo de Mujeres Urbanistas, EASW en Pamplona, 1997. En ligne.